Alors que les performances boursières ont été exceptionnelles en mai pour Nvidia, la société de gestion fait le point.
Détenir l’action Nvidia au mois de mai s’est révélé bénéfique ces trois dernières années, avec une performance mensuelle de +36% en 2023, +27% en 2024 et +22% en 2025. Ne pas prendre ses profits après ces belles progressions a été encore plus judicieux. En effet le titre s’est octroyé plus de 380% depuis le 28 avril 2023. Et cela, malgré tous les soubresauts observés au cours de cette période, notamment depuis le début de l’année.
Nvidia, un baromètre de la tech et de l’IA
L’entreprise, leader dans l’IA (Intelligence Artificielle), domiciliée à Santa Clara en Californie, berceau de la Silicon Valley, a la particularité d’avoir un exercice annuel décalé se terminant fin janvier. Cette spécificité fait qu’elle est toujours la dernière des « 7 Magnifiques » à annoncer ses résultats, ce qui constitue en soi un événement à part entière. Son état de santé représente donc un véritable baromètre. Non seulement pour toute la thématique de l’IA, mais également pour l’ensemble du secteur technologique, avec des répercussions sur le reste de la cote.
Résultats du premier trimestre 2025 : bilan et perspectives
Cette année, le jour J était ce mercredi 28 mai. C'est la date à laquelle Nvidia a publié son rapport d’activité pour le premier trimestre.
Au-delà des chiffres, les perspectives pour le reste de l’année et les commentaires du management sont encore plus importants. Ils sont donc scrutés par les investisseurs, surtout avec les incertitudes liées aux droits de douane, aux restrictions d’exportation et à une concurrence devenue plus féroce.
Résultats financiers solides malgré les tensions géopolitiques
Quelles en sont les conclusions ? Sommes-nous à la fin d’un cycle de domination américaine ou, au contraire, à l’aube d’une nouvelle phase de développement ? Est-il encore possible pour cette entreprise, aux performances historiques exceptionnelles, de croître sensiblement ? Elle qui a vu son chiffre d’affaires passer en seulement trois exercices annuels de 26,95 milliards de dollars en 2023 à presque 200 milliards de dollars cette année (clôturée au 31/01/2026), selon les prévisions des analystes ?
Avant toute chose, le bilan est satisfaisant. Les revenus ont progressé de 69% sur un an glissant, atteignant 44 milliards de dollars. Et le résultat net a augmenté de 26%, à 18,78 milliards de dollars.
Impact des restrictions américaines sur le marché chinois
L’impact de la Chine a été très négatif au premier trimestre, comme préannoncé par la société le 15 avril. Le 9 avril dernier, le gouvernement américain a instauré de nouvelles restrictions à l’exportation pour le H20, le GPU de centre de données conçu spécifiquement par Nvidia pour le marché chinois. En conséquence, l’entreprise n’a pas pu expédier 2,5 milliards de dollars de produits H20 au premier trimestre et a dû enregistrer une charge de 4,5 milliards de dollars en raison de la dépréciation des stocks et des obligations d’achat liées aux commandes reçues avant le 9 avril.
Ce montant est inférieur à ce qui était initialement prévu, certains matériaux ayant pu être réutilisés.
Prévisions pour le second trimestre 2025
Si l’on exclut cette perte exceptionnelle, le bénéfice par action ajusté au premier trimestre aurait été de 0,96 $, soit supérieur au consensus des analystes, qui était de 0,93 $. Cette bonne performance explique la réaction positive du titre au lendemain de la publication.
Pour le second trimestre, les revenus sont estimés autour de 45 milliards de dollars, malgré un effet négatif supplémentaire de 8 milliards de dollars lié à la Chine. La marge brute devrait naturellement retrouver son niveau historique, supérieur à 70%, pour se situer entre 71,8% et 72%.
DeepSeek : une menace crédible pour Nvidia ?
L’annonce, le 20 janvier dernier, d’un nouveau modèle baptisé DeepSeek-R1 a jeté un pavé dans la mare et semé un énorme doute sur la domination américaine, tout en créant une gigantesque confusion chez les investisseurs autour de la thématique de l’IA.
Pour répondre à cette question, il est essentiel d’être factuel et pragmatique. DeepSeek-R1 est un LLM (Large Language Model), ou en français un Langage de Grande Taille. C’est un modèle d’IA entraîné sur d’énormes quantités de textes pour apprendre les structures, les significations et les usages du langage humain, afin de dialoguer, rédiger ou traduire des textes, entre autres. Ses concurrents directs sont donc ChatGPT, Gemini de Microsoft et Llama de Meta.
Un modèle open source attractif, mais limité sans infrastructure
La surprise pour ces concurrents américains a été la fiabilité du modèle, ses capacités de raisonnement avancées, sa résolution de problèmes complexes, son coût et son architecture ouverte. Avantages qui le rendent attractif pour les développeurs. Ce produit les contraint à revoir tous leurs algorithmes.
Cependant, selon Jensen Huang, Président-Directeur Général et fondateur de Nvidia, même si les Chinois DeepSeek et Qwen figurent parmi les meilleurs modèles d’IA en open source, ils auront besoin d’une augmentation massive de capacité, provoquée par une demande d’inférence, mesurée plus communément en tokens. Ce besoin est estimé, à terme, à un multiple de 1.000 par rapport à la demande actuelle. Tout est donc une question d’infrastructure. Et tous les acteurs de la chaîne de l’IA devront s’y attacher, faute de quoi ils seront incapables de répondre à la demande et de proposer des produits performants.
La société souligne également l’émergence de clients souverains, tels que l’Arabie Saoudite ou les Émirats Arabes Unis, qui souhaitent détenir ces infrastructures stratégiques. C’est la raison pour laquelle nous pensons que l’émergence de nouveaux acteurs devrait, quels qu’ils soient, renforcer la position de Nvidia.
Le succès massif des GPU Blackwell conforte Nvidia
La Directrice financière, Colette Kress, a par ailleurs confirmé que les hyperscalers, ou fournisseurs de cloud hyperscale, tels que Microsoft, commandaient actuellement plus de 1.000 racks NVL72 par semaine, soit 72.000 GPU Blackwell. Ce nouveau produit est à ce jour le plus grand succès commercial de la société. Il représente actuellement 70% des revenus dans les centres de données.
Nous sommes donc à l’aube d’une nouvelle phase de renouvellement de produits, et l’entreprise Nvidia est, une fois encore, bien positionnée.
Nvidia peut-elle maintenir sa croissance jusqu’en 2030 ?
Selon les analystes, les revenus devraient avoisiner les 200 milliards de dollars pour l’exercice en cours. Ils devraient croître jusqu’à 250 milliards l’année prochaine, et approcher les 344 milliards de dollars en 2030.
Il est évidemment encore trop tôt pour affirmer si ces estimations sont réalistes. Ce qui semble plus vraisemblable, c’est que Nvidia pourrait franchir le cap des 100 milliards de dollars de résultat net cette année. Comme Apple et Microsoft, rejoignant ainsi un club très fermé, constitué de Saudi Aramco et Alphabet l’année dernière.
Dans ces conditions, le titre reste, selon nous, à conserver en fonds de portefeuille.