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Droits de douane : « Derrière les chiffres, une réalité et des ambitions ! » Par Covéa Finance

Analyse

11/04/2025

 

Q1 : Comment analysez-vous l'annonce de nouveaux droits de douane par l'administration américaine ?

Depuis plusieurs années, nos Perspectives Economiques et Financières s’attachent à décrire un monde moins coopératif, plus complexe, où les fondements du libre-échange et du multilatéralisme sont profondément remis en question. Les annonces de nouveaux droits de douane par l’administration américaine, quoique temporairement mis en pause, s’inscrivent dans ce diagnostic. Tout en surprenant par leur ampleur, ils ne doivent pas étonner sur la volonté des États Unis de redéfinir les équilibres économiques du pays tout en capitalisant sur ses forces, à savoir un coût de l’énergie attractif, une main d’œuvre abondante et qualifiée et un accès large au financement.

Une lecture sommaire des annonces pourrait conduire à penser que les calculs ont été mal préparés ou qu’il ne s’agit là que d’une base de négociation pour obtenir des concessions de la part de partenaires commerciaux (très) dépendants des exportations vers les États Unis. Notre lecture s’inscrit dans une vision à long terme d’une administration américaine très volontariste dans son ambition de rééquilibrer les termes des échanges commerciaux et de réindustrialiser un pays qui souffre de profondes inégalités économiques et sociales.

Ainsi, critiquer la méthode de calcul retenue pour déterminer le niveau des droits de douane, c’est risquer de perdre le sens de la volonté américaine. Avec un déficit commercial de plus de 900 milliards de dollars (balance des biens et des services) … trouver la bonne mesure pour tenter de le réduire, c’est une mission impossible ! Finalement, l’ampleur des droits de douane évoqués n’a de sens que de montrer le déterminisme de l’administration pour résorber une faiblesse structurelle de son économie.

Des aménagements sur ces niveaux de droits vont pouvoir se faire et les négociations sont d’ailleurs déjà en cours avec nombre de pays. Mais les concessions devront être majeures pour conserver l’avantage de commercer avec les États Unis : engagement d’achats de gaz, de matériels militaires, d’avions, de produits agricoles … ou plus significativement encore des engagements de financement de la dette américaine contre un maintien de l’accès au dollar ? Les possibilités sont multiples et les limites n’ont d’égales que la détermination d’une administration américaine à corriger les déséquilibres.

Q2 : Quels vont-être les impacts de cette décision pour les entreprises et plus largement sur l’économie mondiale ?

Cela va impliquer des changements majeurs. Le déplacement des chaînes de production de la Chine vers le Vietnam et le Mexique vient de montrer ses propres limites. Les questions doivent désormais dépasser le cadre de la volonté d’optimiser la structure de coûts en déplaçant le tissu manufacturier. Il s’agit désormais de repenser la production en intégrant les décisions et choix politiques. En amont des communications sur les nouveaux droits de douane, plusieurs projets d’envergure avaient déjà été annoncés : 100 milliards supplémentaires d’investissements sur le sol américain de la part de TSMC, 500 milliards de la part d’Apple, 27 milliards de Eli Lilly…. Un message déjà reçu par certaines entreprises ?

À court terme, les conséquences risquent d’être nombreuses sur l’activité économique mondiale, comme l’illustrent certains arrêts des exportations vers les États Unis (Nintendo, Jaguar), de même que le ralentissement de la production dans les usines de Stellantis au Canada et au Mexique et par répercussion aux États Unis.

À moyen terme, des points de vigilance demeurent quant à la place du dollar dans le système économique et financier mondial, et la réalité de la valorisation et de la liquidité des actifs non côtés qui échappent aux systèmes bancaires et aux places boursières organisés.

Enfin, le risque inflationniste demeure. Entre droits de douane qui augmentent structurellement les coûts de production (adaptation du modèle) et tensions sur le marché du travail, les pressions devraient perdurer et contraindre la Banque centrale américaine dans ses marges de manœuvre. Aussi, contrairement aux épisodes précédents d’importante volatilité, il nous semble peu probable que la Fed adopte une démarche proactive dans sa volonté d’éviter la survenance d’une crise. Toutefois, nous restons convaincus qu’elle ne manquera pas d’être réactive en cas d’instabilité majeure, et notons qu’à ce titre, elle a mis en place des outils supplémentaires de surveillance du marché monétaire pour faire face rapidement à une dégradation de ce dernier.

Q3 : Quel rôle le calendrier politique américain pourrait-il jouer dans l'évolution des marchés financiers et quelles pourraient être les opportunités d’investissement ?

Au cours des semaines à venir, le calendrier politique américain sera une clé de lecture majeure dans le séquençage des annonces de nouvelles mesures économiques. Le risque de perdre une partie du soutien de la base électorale sera un point de vigilance de l’administration américaine et pourrait être l’occasion de communiquer sur des mesures qui feront contrepoids de façon positive sur la croissance (reconduite de la baisse d’impôts sur les ménages, taux impôt à 15% sur la production sur le sol américain). De même, la baisse des cours du « gallon » d’essence apportera un répit aux ménages.

La hausse brutale de la volatilité, ainsi que la baisse d’actifs liquides ayant surperformés jusque-là (Or, taux souverains, valeurs défensives) au cours des derniers jours posent les bases d’une certaine capitulation des investisseurs, forcés pour certains de vendre pour répondre aux appels de marge. Comme nous l’avons décrit dans nos dernières Perspectives Economiques et Financières de mars, ce retour d’une plus grande volatilité et l’arrêt de la concentration des performances sur quelques multinationales devaient être les prémices d’un retour sur la classe d’actifs « actions ». Ces éléments se mettent en place et sont une source d’opportunités. Dans ce contexte, il nous semble important de se concentrer sur les sociétés ayant les capacités humaines, opérationnelles et financières de s’adapter dans cet environnement.

Vincent Haderer, Responsable du pôle Gestion Actions Internationales

Achevé de rédiger le 10/04/2025


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