Votée le 23 octobre 2023, la Loi Industrie Verte, qui est entrée en vigueur le 24 octobre 2024, pour certaines de ses dispositions, a comme principaux objectifs de faire de la France le leader de l’industrie et des technologies vertes en Europe et de verdir les industries existantes.
Afin de mener à bien ce projet, la loi se décompose en trois parties :
- Tout d’abord la réindustrialisation, en favorisant la transition écologique par le biais de mesures destinées à faciliter et accélérer les implantations industrielles,
- Renforcer la prise en compte des enjeux environnementaux dans la commande publique,
- Améliorer le financement de la transition énergétique.
Néanmoins, comment cette loi va-t-elle se décliner dans le paysage de l’assurance vie et de l’épargne ?
Sa mise en œuvre passera par l’introduction et l’élargissement des univers d’investissement à vocation et connotation sociale (tissu social économique de proximité).
Parmi les apports de cette loi nous souhaitons mettre en exergue 3 points majeurs :
- L’ajout d’une définition du mandat d’arbitrage dans le Code des assurances et ses conséquences
- L’évolution du devoir de conseil
- La place accordée aux actifs non cotés
1. Le mandat d’arbitrage et ses impacts
Une première définition dans le code des assurances.
« Convention par laquelle le souscripteur /adhérent, à un contrat d’assurance vie ou de capitalisation, confie à une personne, agissant dans le cadre de ses activités commerciales ou professionnelles la faculté de décider des arbitrages ».
Voici la définition du mandat d’arbitrage qui est appliqué depuis le 24 octobre 2024. Ainsi le client peut donner un mandat d’arbitrage à un assureur ou à un intermédiaire en assurance tel qu’un CGP (les « mandataires »). Ces mandataires décident alors des arbitrages dans les termes prévus par le mandat et l’orientation de gestion définie par l’adhérent/mandant.
C’est l’une des principales innovations introduites par la Loi Industrie Verte, cette définition va encadrer désormais le mandat d’arbitrage qui était jusqu’à présent régi par le Code Civil.
Le mandataire peut déléguer à un prestataire de service en investissement (PSI) (par exemple : société de gestion) habilité à réaliser la gestion du portefeuille pour le compte de tiers, les opérations relevant du mandat d’arbitrage qui lui a été confié. Cette délégation est possible à la double condition que :
- La délégation soit prévue dans le mandat d’arbitrage
- Les opérations réalisées par le délégataire sont conformes aux termes et limites du Mandat.
Cette nouvelle réglementation conduit les assureurs et les CGP à passer en revue les mandats qu’ils pouvaient proposer jusqu’à présent.
Contenu et forme de la convention
Le code des assurances vient également encadrer formellement les informations qui doivent figurer dans le mandat d’arbitrage.
Il est donc important de noter ce que doit contenir le mandat d’arbitrage depuis le 24 octobre dernier:
- Les informations relatives au mandataire (son identité, adresse et agrément ou immatriculation, procédures de réclamation et recours à un processus de médiation, etc.) ;
- Le nom des entités avec lesquelles doit travailler le mandataire (si soumis à cette obligation) ;
- L’identité du tiers et les conditions de délégation si le mandataire confie à un tiers l’exécution de toute ou partie des opérations relevant de son mandat ;( à noter que le mandat doit notamment préciser la nature de la rémunération du délégataire au titre du mandat)
- Une description du profil d’allocation ou de l’orientation de gestion retenue (niveau de risque, de l’horizon de placement, de la stratégie d’allocation d’actifs, etc…) ;
- Informations spécifiques lorsque les opérations peuvent être réalisées sur des supports adossés à des actifs non cotés notamment sur les risques liés à la sélection des unités de comptes, sur les modalités et les conséquences liées au rachat sur ces supports ;
- La durée de la convention de mandat, le cas échéant, et les modalités de reconduction du mandat ainsi que de résiliation ;
- La nature des rémunérations du mandataire, le cas échéant.
Après avoir établi le contenu du mandat d’arbitrage, le CGP se voit dans l’obligation de fournir à ses clients, a minima une fois par an, un reporting régulier. Ce reporting doit aborder un certain nombre d’informations bien spécifiques, précisées par le Code des Assurances. Les informations qui doivent apparaître sont les suivantes :
- La liste des supports en unités de compte qui vont servir à réaliser des arbitrages
- L’ensemble des opérations d’arbitrages qui ont été réalisées ainsi que la date à laquelle ces opérations ont été réalisées sur la période couverte par le mandat.
- La performance du mandat sur la période couverte
- Une attention particulière doit être portée à la communication des clients sur les frais qu’ils vont supporter au titre du mandat d’arbitrage, toujours sur la période couverte par le mandat
- Pour les arbitrages qui concernent des supports en unités de compte adossés à des actifs non cotés, il faut qu’une information particulière, dès lors qu’un rachat sur ces unités de compte est envisagé, apparaisse sur ce reporting. Les clients doivent être informés, notamment, du niveau d’indemnité de rachat qu’ils vont devoir supporter.
A noter que si le CGP est mandataire sur plusieurs mandats en même temps, il devra prévoir à son niveau, une procédure qui vient encadrer les conflits d’intérêts qui pourraient exister.
Dans cette logique d’encadrement des conflits d’intérêts, notons que la Loi Industrie Verte prévoit la suppression de la rémunération à l’acte lors des opérations d’arbitrages à partir du 1er janvier 2026.
2. Le devoir de conseil se voit renforcé
« Le devoir de conseil doit être effectif tout au long de la vie du contrat ». En d’autres termes, l’intermédiaire doit s’assurer que le contrat demeure approprié pendant toute la vie du contrat et doit procéder à une actualisation régulière des informations concernant le souscripteur ou l’adhérent régulièrement. Il s’agit d’une codification d’une obligation issue de la jurisprudence et de la doctrine de l’ACPR.
Ainsi, depuis le 24 octobre 2024, si l’intermédiaire du contrat est informé d’un changement dans la situation personnelle et financière du contractant ou de ses objectifs d’investissement, il convient pour le courtier/CGP, de s’assurer que le contrat demeure approprié ou adéquat aux exigences et aux besoins exprimés (changement dans la situation personnelle/financière du client ou dans ses objectifs d’investissement), et en informer l’épargnant dans le cas contraire.
Une mise à jour est à faire en cas d’opérations significatives qui sont définies comme suit :
=> Un versement, un rachat ou un arbitrage :
« a) Supérieur ou égal à 2 500 euros et à 20 % de l’encours du contrat pour les contrats dont l’encours est strictement inférieur à 100 000 euros ;
« b) Supérieur ou égal à 30 000 euros et à 25 % de l’encours du contrat pour les contrats dont l’encours est supérieur ou égal à 100 000 euros ;
=> Le rachat, le versement ou arbitrage d’une unité de compte mentionnée à la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article L. 132-5-4 (unités de compte adossées à du non coté)
Ne sont pas considérées comme des opérations significatives :
- Les opérations programmées ;
- Les rachats effectués au prorata des supports investis ;
- Les cas exceptionnels de rachat énumérés au L. 224-4 du code monétaire et financier et à l’article L. 132-23 du code des assurances.
De plus, si aucune opération, ou uniquement des opérations programmées*, n’a eu lieu pendant une durée de 4 ans (2 ans en cas de service de recommandation personnalisé), le courtier/CGP devra procéder à une actualisation des informations recueillies afin de s’assurer que le contrat demeure approprié et en informer l’épargnant si ce n’est plus le cas.
Dans le cas où le souscripteur/l’adhérent oppose un refus ou ne donne pas suite à la demande d’actualisation, la durée de 4 ans (ou de 2 ans) est appliquée de nouveau à compter de ce refus ou de la relance (il est donc important de formaliser et de conserver la demande d’actualisation, ainsi que le refus ou la relance).
*Les opérations programmées sont les suivantes : versements, rachats et arbitrages.
Ainsi, une revue est à faire :
Sans considération de seuil ou d’encours, en cas de :
- Changement dans la situation du souscripteur ou de l’adhérent : situation financière ou personnelle,
- Changement dans les objectifs d’investissement,
- Versement/arbitrage/rachat concernant une unité de compte adossée à du non coté,
- Contrat n’ayant fait l’objet d’aucune opération durant 4 ans (ou 2 ans si recommandation personnalisée),
- Contrat n’ayant fait l’objet que d’opérations programmées durant 4 ans (ou 2 ans si recommandation personnalisée).
Pour les opérations non programmées, hors unités de compte adossées à du non coté, il existe des considérations de seuils et d’encours :
a) Supérieur ou égal à 2 500 euros et à 20 % de l’encours du contrat pour les contrats dont l’encours est strictement inférieur à 100 000 euros ;
b) Supérieur ou égal à 30 000 euros et à 25 % de l’encours du contrat pour les contrats dont l’encours est supérieur ou égal à 100 000 euros ;
Deux exceptions au devoir de conseil existent, en plus des opérations programmées : les rachats exceptionnels prévus de manière limitative par le Code des Assurances et le Code Monétaire et Financier, ainsi que le rachat au prorata des supports investis. Cependant, une exigence de conseil permanent s'applique aux opérations concernant les actifs non cotés, notamment dans le cas particulier de la gestion sous mandat, tel que précisé à l'article L 132-27-4 du Code des Assurances.
Pré contractuellement, cela se manifeste par la modification de la documentation client avec des informations spécifiques sur les éventuelles pénalités applicables pour les unités de compte de Private Equity ainsi que l’obligation de communication sur les performances pour chaque unité de compte (moyenne annualisée sur 5 ans).
Contractuellement, devrait apparaître dans le relevé de situation, à partir de 2026 (sur l’exercice 2025) :
- La disponibilité de conseil en cours de vie du contrat
- Les performances et frais des unités de compte individualisés
- Les modalités de rachat et frais de rachat des unités de compte de Private Equity
- Le lien d’accès aux informations publiées sur le site internet
- La période de référence (qui peut être amenée à évoluer)
3. Les supports adossés à des actifs non cotés mis à contribution : impacts sur les contrats d’assurance vie et d’épargne retraite (PER)
La Loi Industrie Verte implique que les assureurs doivent intégrer 3 profils réglementaires (profil prudent, équilibré et dynamique) dans leurs contrats d’assurance vie et de capitalisation multisupport. Pour certains d’entre eux, notamment pour les profils équilibré et dynamique, un investissement minimum sera requis sur des supports adossés à des actifs non cotés.
Autre nouveauté de la Loi Industrie Verte, les assureurs commercialisant des Plan d’Epargne Retraite (PER) ont la possibilité d’intégrer 4 profils (prudent, équilibré, dynamique et offensif) dans leur gestion pilotée à horizon avec l’obligation d’un quota de support adossé à des actifs non cotés pour chacun des profils.
Par ailleurs les assureurs ont l’obligation de référencer, au sein de leur liste de supports en unités de compte, des supports ayant obtenu des labels reconnus par l’Etat répondant aux objectifs de transition écologique ou d’investissement socialement responsable. Parmi ces labels, nous pouvons citer : le label GreenFin, le label ISR et le label Finansol.
Ces labels, soutiennent des entreprises dans le secteur de la transition énergétique et sont vus comme un gage de respectabilité des nouvelles normes du secteur.
Communication à caractère publicitaire au 05/11/2024.