Dans les pays en développement, investir là où les capitaux sont rares contribue généralement à la lutte contre les problèmes les plus urgents à résoudre de notre époque. La problématique hommes-femmes est transversale : les progrès dans ce domaine sont étroitement liés à toutes les autres avancées sur les différents Objectifs de Développement Durable (ODD). Les investisseurs peuvent jouer et jouent un rôle dans la promotion d’une plus grande égalité des genres dans les pays en développement via trois thèmes d’investissement : l’inclusion financière, l’agriculture durable et l’accès à l’énergie.
Quels sont les Objectifs de développement durable des Nations Unies ?
Les Objectifs de développement durable des Nations Unies sont un ensemble de 17 objectifs interconnectés qui ensemble constituent un schéma directeur pour parvenir à la paix et à la prospérité de tous et de la planète, aujourd’hui et demain. Les objectifs, qui doivent être atteints d’ici 2030, couvrent des domaines tels que l’élimination de la pauvreté et l’amélioration de la santé, la réduction des inégalités, la lutte contre le changement climatique et la préservation de nos océans et de nos forêts.
Une nature interconnectée
On peut soutenir qu’il n’existe pas un enjeu dans le monde du développement durable - depuis l’inclusion financière jusqu’au risque lié au changement climatique - où les résultats ne sont pas pires pour les femmes. De par leur nature, les ODD sont inextricablement liés, les progrès dans un domaine nécessitant des avancées dans d’autres. Et si l’ODD 5 plaide spécifiquement en faveur de l’égalité entre hommes et femmes, la thématique du genre est présente dans tous les objectifs. Par conséquent, on ne peut espérer atteindre les ODD sans aborder systématiquement les inégalités entre les genres.
L’état actuel des choses
Bien que des progrès aient été accomplis, nous sommes encore loin de l’égalité entre hommes et femmes à l’échelle mondiale. Actuellement, nous sommes en passe d’atteindre seulement 15,4 % des indicateurs de l’ODD 5 : Égalité entre les sexes d’ici 2030, tandis que 23,1 % sont considérés comme loin ou très loin d’être en bonne voie1. En fait, au rythme actuel, il faudra encore 131 ans2 pour combler les disparités entre les genres dans le monde.
« Au rythme actuel, il faudra encore 131 ans pour combler les disparités entre les genres dans le monde. »
La situation actuelle varie considérablement d’une région à l’autre, mais c’est l’Europe qui est à la tête de la course pour atteindre cet objectif de parité hommes-femmes. Il reste encore beaucoup à faire dans une grande partie du monde en développement - le Moyen-Orient, puis l’Afrique du Nord et l’Asie du Sud sont les régions qui ont le moins avancé3.
Il existe également des différences notables lorsque l’on prend en considération différents aspects de l’égalité entre hommes et femmes. Par exemple, l’égalité dans le domaine de la scolarisation est à la hausse depuis quelques décennies. À l’échelle mondiale, 91 % des filles vont à l’école primaire, contre 93 % des garçons. Lorsque les enfants atteignent l’enseignement secondaire supérieur, les filles devancent dès lors les garçons (54 % contre 52 %)4. Les résultats en matière de santé se sont également améliorés, les agences de développement mondiales étant davantage en mesure d’intervenir directement et d’apporter leur aide.
Toutefois, des progrès sont encore nécessaires en ce qui concerne l’autonomisation financière des femmes. Au niveau mondial, moins de la moitié des femmes en âge de travailler participent à la population active. Mais là encore, il existe des différences régionales, de 60,9 % en Afrique subsaharienne à 18,8 % en Afrique du Nord et au Moyen-Orient5.
Graphique 1 : Le taux de participation à la population active des femmes varie dans le monde
Source : Organisation internationale du travail (OIT). Données extraites du portail de données sur le genre de la Banque mondiale (SL.TLF.ACTI.ZS), en date du mois de novembre 2023.
Les opportunités pour les investisseurs
La lutte contre les inégalités entre hommes et femmes offre de nombreuses possibilités d’encourager des résultats positifs en matière de développement durable et de générer des performances financières. Grâce aux progrès de l’éducation, il existe actuellement un nombre sans précédent de jeunes femmes instruites, disposant d’un revenu disponible et prêtes à faire leur entrée dans la population active. Une étude de Moody’s avance que l’éradication des disparités entre hommes et femmes sur le lieu de travail pourrait avoir pour effet d’accroître de 7 000 milliards de dollars le PIB mondial chaque année6. Les entreprises où les femmes sont fortement représentées sont également 25 % plus susceptibles d’enregistrer des résultats financiers supérieurs à celles de leurs concurrentes moins diversifiées7.
Si certains aspects de l’enjeu de l’égalité des genres nécessitent des changements culturels et politiques, les investisseurs peuvent néanmoins jouer un rôle important dans l’amélioration des résultats. Par exemple, en aidant financièrement des modèles économiques qui fournissent directement des solutions à l’autonomisation des femmes, en particulier en matière d’accès à des services essentiels.
Une autre approche consiste à s’engager auprès des entreprises en portefeuille, et ce, qu’elles visent ou non un objectif précis en matière de dimension hommes-femmes, de manière à s’assurer qu’elles ont mis en place des politiques et des procédures adéquates. Par exemple, dans des domaines tels que la lutte contre le harcèlement, le congé parental et les promotions équitables.
Graphique 2 : Moins de femmes sont chefs d’entreprise dans les pays en développement
Source : Enquêtes auprès des entreprises de la Banque mondiale, en date du mois de novembre 2023.
Le financement pour les femmes chefs d’entreprise
Dans les pays en développement, une option pour les investisseurs désireux de contribuer à garantir des conditions égales aux hommes et aux femmes consiste à accompagner les sociétés qui offrent des financements aux femmes entrepreneurs et chefs d’entreprise, ainsi qu’à réduire les disparités entre les hommes et les femmes en matière d’inclusion financière de façon plus générale. Les barrières culturelles, voire juridiques, font que les emplois formels sont considérablement moins nombreux pour les femmes dans beaucoup de pays en développement. Par ailleurs, les femmes qui créent leur propre entreprise ont souvent plus de peine à accéder au crédit que les entrepreneurs masculins, notamment parce qu’elles n’ont souvent pas de garanties, telles que la propriété foncière. Dans le cadre du modèle de microfinance « classique », les institutions financières tentent de surmonter ce problème en facilitant la pratique du « crédit de groupe ».
Qu’est-ce que le crédit de groupe ?
- Le crédit de groupe consiste à prêter de l’argent à un groupe de personnes, par exemple des femmes entrepreneurs dans un village rural.
- La garantie physique est remplacée par une « garantie sociale » - les membres du groupe s’auto-sélectionnent et sont mutuellement responsables des paiements des autres, encourageant ainsi le remboursement dans les délais.
- Ce faisant, les femmes ont la possibilité de surmonter les barrières culturelles et d’obtenir un financement pour créer ou développer une entreprise.
Les opportunités dans l’agriculture
Les femmes issues des milieux ruraux représentent près de la moitié de la main-d’œuvre agricole mondiale, mais moins de 20 % des propriétaires de terres agricoles8. Elles sont souvent empêchées de posséder des terres en raison de l’insuffisance des crédits, de l’inégalité des salaires, du peu de doit à la prise de décision, de la violence fondée sur le genre ou de l’inégalité des règles d’héritage entre hommes et femmes. Celles qui possèdent des terres agricoles se voient refuser de manière disproportionnée l’accès au financement et aux intrants essentiels, tels que les engrais et les pesticides.
Toutefois, les investisseurs peuvent encourager un changement positif en soutenant de diverses manières les petites exploitations dirigées par des femmes. Ils peuvent notamment financer directement les agriculteurs, leur fournir des services de formation et d’éducation, leur permettre d’accéder à la technologie ou aider financièrement des entreprises qui promeuvent une rémunération équitable pour les agriculteurs.
L’accès à l’énergie
En raison du manque d’infrastructures de réseau fiables, on estime que 52 % de la population rurale mondiale dépend de technologies polluantes, telles que les lampes à kérosène et les générateurs à combustibles fossiles, pour l’éclairage domestique et les besoins en électricité9. La pollution de l’air intérieur émise par ces appareils est responsable de 3,2 millions de décès prématurés et de la perte de 86 millions d’années de vie en bonne santé chaque année10. Ce sont les femmes et les jeunes filles qui sont les plus touchées car elles passent plus de temps à l’intérieur et à proximité de la maison.
« Les femmes et les enfants peuvent éviter les problèmes de santé liés à la pollution de l’air à l’intérieur des habitations et avoir davantage de possibilités d’activités liées à la santé et au développement personnel, telles que des études ou la création d’une entreprise. »
En l’absence de mesures suffisantes des pouvoirs publics, 1,9 milliard de personnes n’auront toujours pas accès aux combustibles et aux technologies propres en 2030, la majorité d’entre elles résidant en Afrique subsaharienne11. Toutefois, les investisseurs peuvent avoir un impact positif en la matière en apportant leur soutien aux entreprises qui fournissent des systèmes d’énergie solaire résidentiels hors réseau, qui remplacent les générateurs et les lampes à combustible fossile. Ces systèmes se composent d’un panneau solaire installé sur le toit, qui se connecte à l’éclairage et à une prise de courant, et sont souvent vendus aux propriétaires dans le cadre d’un financement pluriannuel pour les rendre plus abordables.
Les avantages de ces systèmes sont considérables. Tout d’abord, les femmes et les enfants peuvent éviter les problèmes de santé liés à la pollution de l’air intérieur des habitations. L’accès à une énergie propre et fiable - et la réduction du temps consacré à la collecte et à la préparation des combustibles - offre également de plus grandes possibilités de pratiquer des activités liées à la santé et au développement personnel, comme étudier le soir ou créer une entreprise en vue de générer un revenu.
Le rapport SDG Reckoning - une mise à jour des progrès accomplis vers la réalisation des ODD
En ce qui concerne la réalisation des ODD, l’ambition du monde apparaît actuellement bien loin d’être atteinte au regard des efforts mis en œuvre. Dans le rapport annuel SDG Reckoning, publié par notre société mère M&G plc, nous évaluons les progrès accomplis dans la réalisation de chacun des 17 ODD, à la fois d’un point de vue général et sous l’angle de l’investissement d’impact.
Lire le rapport (en anglais uniquement)
Veuillez noter que bien que nous soutenions les ODD des Nations Unies, nous ne sommes pas associés à cette organisation et nos fonds ne sont pas approuvés par elle.
1 Division de la statistique des Nations Unies, « Gender equality », (unstats.un.org), juin 2023.
2 Forum économique mondial, « Global Gender Gap Report 2023 », (weforum.org), juin 2023.
3 Forum économique mondial, « Global Gender Gap Report 2023 », (weforum.org), juin 2023.
4 UNICEF, Tableau de bord de l’analyse des parcours éducatifs, (data.unicef.org) 2021.
5 Banque mondiale, portail de données sur le genre, (worldbank.org), novembre 2023
6 Moody’s Analytics, « Close the Gender Gap to Unlock Productivity Gains », (moodysanalytics.com), mars 2023.
7 McKinsey & Company, « Diversity wins: How inclusion matters », (mckinsey.com), mai 2020.
8 Nations Unies, « Securing Women’s Land Rights for Increased Gender Equality, Food Security and Economic Empowerment », (un.org), juin 2023.
9 Organisation mondiale de la santé, « Household air pollution and health », (who.int), novembre 2022.
10 Organisation mondiale de la santé, « Household air pollution and health », (who.int), novembre 2022.
11 Organisation mondiale de la santé, « Household air pollution and health », (who.int), novembre 2022.